Je ne sais pas vous, mais j’ai passé plus de temps au téléphone depuis le début de cette crise sanitaire que pendant les 5 dernières années. Et bizarrement, je retrouve les joies de ce mode de communication.
Pendant des années, j’ai haï le téléphone. Je prévenais ma famille et mes amis de ma détestation, et je faisais de la résistance en répondant le moins possible aux appels. En amont, je demandais à ne pas être contactée par ce biais. Je ne supportais pas d’être au service de cette sonnerie intempestive, se manifestant forcément au mauvais moment ; je ne voulais pas être esclave de cet engin tyrannique.
Tout a changé, évidemment.
Les appels téléphoniques ont remplacé les séances, les assemblées générales, les comités, les pots entre amis, les tendres discussions sur l’oreiller. La voix a remplacé la bise, l’accolade, le tendre baiser, le corps à corps.
Auparavant, la sonnerie du téléphone provoquait chez moi une tension, une angoisse ; je me sentais piégée. Aujourd’hui, c’est un bonheur, je me réjouis de cette parenthèse de contact humain vibratoire qui casse ma solitude forcée.
Les appels commencent même à être plus nombreux que les écrits, tellement il me semble que cela nous fait du bien de nous entendre. Les appels sont tellement nombreux que l’oreille ne supporte plus le contact de l’engin ; le casque audio est devenu obligatoire pour tenir sur la durée.
Tou en parlant, on continue de vivre, on se déplace, on cuisine, on met une lessive, on nourrit le chien. Ou alors on se love sur le canapé ou dans le lit et les mots s’échappent, se libèrent et fusent, alors que le corps se prélasse, s’abandonne.
Nos voix, notre lien…