Je ne suis pas un modèle de féminisme et je ne peux certes pas prétendre que mon attrait pour les « Louboutin » vertigineuses participe à la construction de nouveaux rapports sociaux entre les sexes.
Je tombe avec bonheur et certainement un peu de perversion dans tous les clichés: cheveux longs et éclaircis (une bonne demi-heure de lavage/séchage/lissage tous les matins), ongles manucurés (une heure et demi de papotage à l’institut chaque mois), talons hauts même dans un concert de rock (impossible de sauter en l’air en hurlant Lennyyyyyy), jamais de pantalons (budget collants faramineux).
Suis-je pour autant une victime des codes et diktats que notre société impose pour qualifier la Féminité? Ou sont-ce les hommes les vraies victimes de ces fameux codes? Il faut dire que ces caractéristiques leur font perdre la tête et faire absolument n’importe quoi. Enfin, pas n’importe quoi, plutôt exactement ce qu’on veut. Il faut le vivre au quotidien pour saisir le pouvoir de la fausse blonde à talons.
Pare-choc de la voiture qui précède légèrement embouti parce qu’on vérifiait son maquillage dans le miroir du pare-soleil? « Un constat? Oh non c’est rien, ça ne se voit même pas, ne vous en faites pas ».
Ticket de parking égaré après 8h de stationnement en sous-sol à Plainpalais? « Allez, normalement c’est 30.- mais filez dans votre voiture, je vous ouvre la barrière ».
Pas un centime en poche et carte EC non fonctionnelle une minute avant la fermeture à la station essence alors qu’on est gravement en manque de cigarettes Vogue menthe? « Je vous les offre, c’est ma BA du jour ».
Mais c’est rarement de la vraie drague, je vous assure. Le ton est plutôt paternaliste, presque protecteur. Une fausse blonde à talons et en détresse laisse rarement indifférent. C’est une petite chose fragile un peu perdue dans ce monde de brutes. Il est donc normal qu’elle ait quelques ratés logistiques.
Evidemment, il faut toujours accompagner le souci en cours d’un sourire contrit, d’oeillades enfantines, et adopter un ton de voix un peu plus aigu qu’à l’habitude. La « high heels blond attitude » étant tout aussi importante que la blondeur perchée elle-même. Une fois le problème balayé par l’Homme d’un revers de main, ne jamais oublier le « Vous êtes tellement gentil, c’est incroyable », comme s’il était le seul à vous avoir jamais sauvée. Alors que ça vous arrive en permanence.
Eviter toutefois d’ajouter « Je ne sais pas comment vous remercier », car l’Homme, lui, sait. Et le but est de pouvoir filer au plus vite sans constat/sans payer le parking/avec ses cigarettes. Pour rejoindre si possible celui qui voit au-delà de vos artifices et vous considère comme une égale, bien maligne de savoir si bien user de ses charmes pour surmonter les petits obstacles du quotidien.